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Articles > À la découverte de la langue russe

par Alexis Ulrich  LinkedIn

La langue russe est timide, elle se cache derrière l’apparente complexité de son alphabet cyrillique pour ne se dévoiler qu’aux personnes qui prennent le temps de passer cette première barrière. Il y en a d’autres ensuite, bien sûr, mais c’est ce premier pas qui donne le ton.

La cathédrale Saint-Basile-le-Bienheureux à Moscou
© Ivan Lopatin, Unsplash

L’alphabet cyrillique et la prononciation

Les lettres de l’alphabet ne se prononcent pas comme en français, même si elles ressemblent parfois à d’autres lettres, à l’exception de Томкат (les lettres qui composent le mot Т-о-м-к-а-т se prononcent bien comme les lettres correspondantes en français). Par exemple, on a le я qui se prononce /ya/, le р qui se prononce /r/, ou encore le н qui se prononce /i/.

Il pourrait être tentant de court-circuiter l’alphabet cyrillique histoire d’aller plus vite dans l’apprentissage de la langue. Des outils de translittération permettent de passer du cyrillique à l’alphabet latin. Ce n’est pas une bonne idée, car il faudra tôt ou tard s’y plonger, alors autant commencer par là dès le début.

L’accent tonique se place n’importe où, ou disons plutôt qu’il n’y a pas de règle définie : il faut l’apprendre pour chaque mot. A priori, il y a peu de faux amis, comme эамок (la serrure) et эамок (le château), ou encore мука (la farine) et мука (la souffrance).

Certaines lettres se prononcent différemment suivant où elles se trouvent dans le mot. Par exemple, le о se prononce /o/ s’il porte l’accent tonique, mais /a/ s’il ne l’a pas : погода (le temps qu’il fait) se prononce /pagOda/ et non /pogOda/. De même, е /yé/ et я /ya/ se prononcent /i/ quand elles n’ont pas l’accent tonique : семь [7] se prononce /sYÉm/ alors que восемь [8] se prononce /vOssim’/. On retrouve la même chose avec девять [9], /dYÉvit’/, et десять [10], /dYÉsit’/. Cela dit, elles se prononcent /yi/ en début de mot et /yé/ (respectivement /ya/) en fin de mot si elles ne portent pas l’accent tonique. Les premiers exercices de lecture pour apprendre des mots sont bien difficiles.

S’ajoutent à tout cela les consonnes dures et les molles (ou mouillées) qui modifient la prononciation de certaines voyelles qui les suivent, mais avec des exceptions…

Arrêtons-nous là pour la lecture et la prononciation. Passons à quelques points plus faciles.

Hôtel - отель
© Max Titov, Unsplash

Les articles

Il pas d’article en russe : кот veut tout aussi bien dire le chat que un chat. On dirait que cela facilite l’apprentissage, quoique…

Le genre en russe

Le russe compte trois genres : le masculin, le féminin et le neutre. Et comme verbes et adjectifs s’accordent en genre, il faut apprendre celui de chaque mot, ce qu’on fait en français grâce à l’article. Bien évidemment, les genres ne sont pas toujours les mêmes qu’en français : une forêt est masculin (лес), un chien est féminin (собака).

Cela dit, les règles sont assez simples : est masculin tout mot qui se termine par й ou une consonne (sauf quelques exceptions identifiables contextuellement, comme папа, papa) ; est féminin tout mot qui se termine par а, ия ou я ; et enfin est neutre tout mot se terminant par о, е, ие, ье, ое ou мя. Restent les mots se terminant par le signe mou ь dont le genre doit être appris par cœur. Rassurez-vous, ils sont peu nombreux.

Exprimer la possession

L’expression de la possession est surprenante pour un francophone. Pour dire « J’ai un stylo », on utilise la structure « Un stylo est chez moi / à côté de moi » (У меня есть ручка). C’est le stylo qui est le sujet (au nominatif), меня étant le pronom я (je) au génitif, ce qu’on traduirait directement par « Le stylo est à moi ».

Restaurant, bar, karaoké - Ресторан, бар, караоке
© Myznik Egor, Unsplash

Les déclinaisons

Comme vous le découvrez peut-être, la langue russe est dite flexionnelle, c’est-à-dire qu’elle comporte des déclinaisons, six en l’occurrence : nominatif (sujet, acteur), génitif (possession, complément de nom), datif (destination, attribution, COI), accusatif (destination, objet direct, COD), instrumental (moyen, durée) et locatif (localisation). Les noms, les adjectifs et les pronoms (personnels, démonstratifs, possessifs, interrogatifs) se déclinent.

L’aspect perfectif et imperfectif

L’aspect en russe est lexical et non sémantique : il utilise des mots différents au lieu d’une différence de sens. Pour rappel, l’aspect grammatical a deux formes : le perfectif (où l’action doit être terminée pour avoir lieu), et l’imperfectif (où elle peut être en cours). Les oppositions chercher / trouver ou ignorer / savoir illustrent ces aspects de façon sémantique en français : trouver implique la fin de la recherche, alors qu’on peut chercher pendant longtemps sans jamais rien trouver. Pour revenir au russe, les verbes vont par paire imperfectif / perfectif : открывать / открыть (ouvrir, découvrir), видеть / увидеть (voir, comprendre), etc.

Taxi russe - Такси
© Max Titov, Unsplash

Les emprunts lexicaux

Les emprunts lexicaux sont un raccourci avéré pour apprendre du vocabulaire à moindre coût. Voici quelques mots russes venant du français, de l’anglais ou encore de l’allemand.

Le russe a emprunté de nombreux mots français, notamment au XVIIIe siècle. On les retrouve par exemple dans les domaines de la gastronomie, de la mode et de l’architecture : круассан (/kruassan/, croissant), суп (/sup/, soupe), десерт (/desert/, dessert), майонез (/majonez/, mayonnaise), робы (/roby/, robes), неглиже (/negliže/, déshabillé), корсет (/korset/, corset), монумент (/monument/, monument), балюстрад (/balûstrad/, balustrade), террасса (/terrassa/, terrasse), театр (/teatr/, théâtre), ресторан (/restoran/, restaurant), отель (/otel’/, hôtel)…

Et dans l’autre sens, on trouve aussi pas mal de mots russes passés au français : datcha (да́ча, maison secondaire), glasnost (гла́сность, transparence), goulag (кула́к), matriochka (матрёшка, poupées gigognes), mazout (мазу́т), samovar (самова́р), steppe (степь)…

Les emprunts à l’anglais sont aussi nombreux : бизнес (business), компьютер (computer, ordinateur), футбол (football), спорт (sport), джетла́г (/djetlа́g/, jetlag), покерфе́йс (/pokerféïs/, poker face)…

On trouve aussi des emprunt à l’allemand, comme фейерве́рк (Feuerwerk, feux d’artifice), квита́нция (Quittung, reçu) ou Шприц (Spritze, seringue).

Une grande famille

Le russe fait partie de la famille des langues slaves, un ensemble de langues suffisament proches pour que l’apprentissage de l’une facilite la compréhension d’une autre (un peu comme les langues latines entre elles). Les langues des peuples slaves orthodoxes (le biélorusse, le bulgare, le macédonien et l’ukrainien) utilisent d’ailleurs le même alphabet cyrillique, tandis que celles des slaves catholiques (le polonais, le tchèque, le slovaque, le slovène, le croate) utilisent l’alphabet latin. Tout cela pour dire que l’ouverture à la culture russe acquise par la connaissance de cette langue élargira encore votre horizon.

Pour aller plus loin

Pour commencer à m’initier à la langue russe, je me suis principalement basé sur la chaîne YouTube Le russe avec une Russe.