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Articles > Ethereum, ether et ses unités

par Alexis Ulrich  LinkedIn
Logo Ethereum avec portraits de Charles Babbage et Ada Lovelace

Si l’euro a ses centimes, le dollar ses cents et la livre ses pence, l’ether, la monnaie cryptographique d’Ethereum, a de nombreuses subdivisions, du milliether ou finney jusqu’au wei, à 18 décimales après la virgule. Quelles sont-elles ? D’où viennent leur nom ?

Les concepts d’Ethereum

Pour faire simple, on peut dire qu’Ethereum est un ordinateur décentralisé sur lequel peuvent tourner des applications décentralisées, les DApps. Ces programmes, ou contrats intelligents (smart contracts), sont conçus pour s’exécuter automatiquement quand certaines conditions sont atteintes, qu’elles soient internes à la chaîne de blocs (comme une information au sujet d’une transaction) ou externes (variable non inscrite dans la chaîne de blocs, accédée par un oracle qui forme un pont entre la chaîne de blocs et le reste du monde).
Puisqu’elles sont inscrites sur la chaîne de blocs (blockchain) d’Ethereum, ces applications sont immuables (censures, fraudes ou interférences sont impossibles) et transparentes (le code étant public, tout le monde peut le lire et vérifier qu’il fait bien ce qu’il est censé faire).

Les types d’applications les plus connus sont les ICOs (pour Initial Coin Offering, ou Offre initiale de monnaie) qui permettent de lever des fonds pour des projets et de gérer des monnaies cryptographiques, et les DAOs (pour Decentralized Autonomous Organization, ou Organisation Décentralisée Autonome) qui gèrent de façon automatique l’ensemble des règles de fonctionnement d’une organisation (appartenance, hiérarchie, distribution).

Pour faire fonctionner cette infrastructure distribuée, certains nœuds du réseau, qu’on appelle des mineurs, valident les transactions et les inscrivent dans la chaîne de blocs. Ces mineurs sont rétribués en jetons (tokens) dénominés en ethers, la monnaie cryptographique d’Ethereum.
D’autres nœuds sont chargés d’exécuter les smart contracts dans la machine virtuelle Ethereum (EVM), un environnement d’exécution isolé. Une fois compilés, ces programmes sont ajoutés à la chaîne de blocs via une transaction. Ainsi, les transactions monétaires et les smart contracts se trouvent toutes inscrites dans la blockchain.

Les programmes eux-mêmes consomment des unités monétaires, une façon de forcer leur efficience et d’éviter qu’ils ne se servent gratuitement de la puissance de calcul du réseau. Cette quantité, appelée gaz (incorrectement traduite de l’anglais gas, soit essence en français, mais l’usage fait loi) a son propre cours afin d’être décorrélé du cours de l’ether : le coût d’un smart contract serait trop fluctuant s’il était directement lié au cours de la cryptomonnaie. En résumé, on peut dire que le gaz comptabilise la quantité de travail effectué, et que son paiement effectif se fait, lui, en ethers. Le prix du travail (en gas) est donc séparé de sa valeur (en ether). Les quantités de gas sont exprimées en wei, ou en milliardième de milliardième d’ether (10-18).

Tableau des dénominations des multiples et sous-multiples de l’ether

Système InternationalNom usuelEffigie
10-18 – attoetherweiWei Dai
10-15 – femtoetherkwei ou adaAda Lovelace
10-12 – picoethermwei ou babbageCharles Babbage
10-9 – nanoethergwei ou shannonClaude Shannon
10-6 – microetherszabo ou microNick Szabo
10-3 – millietherfinney ou milliHarold Finney
1 – etherether
103 – kiloetherkether, grand ou einsteinAlbert Einstein
106 – megaethermether
109 – gigaethergether
1012 – teraethertether

Étymologie des subdivisions de l’ether

Si les noms des subdivisions de l’ether suivent les conventions du système international (comme milli pour un millième ou 10-3), certaines dénominations portent aussi un nom usuel basé sur des personnes, les effigies.

Wei Dai

Le wei (10-18) rend hommage à Wei Dai, inventeur en 1998 d’un protocole et de sa cryptomonnaie associée, la b-money, un système de monnaie électronique anonyme et distribué, décrivant les concepts-clés implémentés dans les futurs protocoles cryptographiques, dont Bitcoin. Il est d’ailleurs cité dans l’article fondateur de 2008 « Bitcoin: A Peer-to-Peer Electronic Cash System » (Bitcoin : un système de liquidité électronique pair-à-pair) du mythique Satoshi Nakamoto, l’inventeur du protocole Bitcoin.

Ada Lovelace

Aquarelle représentant la comtesse Ada Lovelace en 1840 par Alfred Edward Chalon (1780–1860)

Ada Lovelace était une mathématicienne du 19e siècle, célèbre pour être la première programmeuse de l’histoire de l’informatique, puisqu’elle a écrit un algorithme pour la machine analytique, proposition d’ordinateur de Charles Babbage, afin de calculer les nombres de Bernoulli. Son nom a été donné à un langage informatique, l’Ada.
Pour ce qui nous concerne ici, il est aussi donné au kwei ou femtoether (10-15 ether).


Charles Babbage

Huile représentant Charles Babbage en 1845 par Samuel Laurence (1817-1884)

Mathématicien et ingénieur mécanique du 19e siècle, le britannique Charles Babbage a été l’inventeur d’une machine analytique à cartes perforées et d’une machine à différences, précurseurs de l’ordinateur. Ses machines ne purent être construites qu’après sa mort, lorsque les technologies nécessaires furent suffisantes.
Son nom est donné au mwei ou picoether (10-12 ether).


Claude Shannon

Photographie de Claude Shannon par Konrad Jacobs

Mathématicien américain, Claude Shannon a fondé la théorie de l’information dans son article de 1948 intitulé « A Mathematical Theory of Communication » (Une théorie mathématique de la communication), théorie se servant des probabilités pour mesurer le contenu en information d’un ensemble de messages. On y trouve les concepts de codage de l’information, de mesure quantitative de redondance d’un texte, de la compression de données et de la cryptographie, dans laquelle on retrouve la cryptographie asymétrique (à clé publique et privée) qui a une importance particulière pour les cryptomonnaies.
Son nom est donné au gwei ou nanoether (10-9 ether).


Nick Szabo

Nick Szabo est l’inventeur du concept et de l’expression « smart contract » dans son article « Smart Contracts: Building Blocks for Digital Free Markets » (Les smart contracts : briques de base des marchés libres numériques) publié en 1996 dans le numéro 16 de la revue Extropy. Il a aussi proposé en 1998 un mécanisme de monnaie numérique décentralisée, le bit gold, basé sur la création de chaînes infalsifiables de preuves de travail avec clés privées et signatures numériques.
Son nom est donné au micro ou microether (10-6 ether).

Hal Finney

Cryptographe et développeur, Harold « Hal » Finney a créé en 1984 la première preuve de travail réutilisable (RPOW) qui permet de générer des jetons (tokens ou coins) prouvant que le travail nécessaire pour les miner a été accompli. Il est aussi la première personne à avoir reçu des bitcoins de Satoshi Nakamoto lors de la première transaction effectuée dans cette cryptomonnaie en janvier 2009.
Son nom est donné au milli ou milliether (10-3 ether).

Albert Einstein

Photographie de Albert Einstein en 1921 par Ferdinand Schmutzer (1870–1928)

Si le physicien théoriste Albert Einstein est connu pour ses travaux sur la relativité et la célèbre formule d’équivalence entre la masse et l’énergie, on lui attribue de nombreuses citations dont la suivante (et probablement apocryphe) : « Les intérêts composés sont la plus grande force dans tout l’univers. »
On retrouve en filigrane le passage d’Ethereum à la preuve d’enjeu ou preuve de participation (proof of stake) en lieu et place de la preuve de travail (proof of work) pour atteindre un consensus distribué dans la version Serenity, ce qui limitera la consommation d’énergie des mineurs.
Est-ce pour cela que son nom est donné au kether, grand ou kiloether (103 ether) ?